Grosse banque et grosse tête [PV Thunderstrike]

Manhattan, pour quelqu'un du Queens, c'était l'endroit un peu vachement hypé. Vous savez, dans les grandes villes, il y a le cœur riche, lointain pour nous autres banlieusards, et ça a toujours un aspect bizarre. Genre vraiment, vraiment bizarre. Premièrement, ça a un côté légende, loin, pas vraiment accessible, car on a tout ce qu'il nous faut où on est et pas besoin d'aller là-bas car c'est trop cher. Deuxièmement, bah... ouais, c'est cher le centre de New-York. Le Queens, c'est le coin sympa, bien plus modeste, et il faut donc savoir reconnaître qu'on est pas ici du même moule, avec ces gens-là.

Ah, et évidemment, il y avait l'identité. Ici, à New-York, venir du Queens ou de Manhattan, du Bronx ou de Brooklyn ou encore de Harlem, ça ne voulait pas dire vouloir la même. On avait de gros sentiments d'appartenance avec nos quartiers.

Bref.

Tout ça pour dire que j'adorais voltiger entre les gratte-ciels dans le soir naissant, en plein cœur de la ville : tout le monde me voyait, me pointait du doigt, et on m'applaudissait même parfois. C'était vachement sympa comme sensation, j'trouvais ça assez drôle. Bon, ok, ça m'arrivait aussi de me perdre dans tout ça. Mais pas en ce moment, car là, pour l'instant, j'étais de sortie, en tenue et tout, et j'allais casser du vilain méchant monsieur ! Et oui, mesdames et messieurs, Spiderman était en plein boulot, plutôt que de rentrer chez lui faire ce qu'il devait faire pour son autre boulot avant.

Que voulez-vous, la veuve et l'orphelin n'attendent pas !

Enfin, en l'occurrence, la veuve et l'orphelin, c'était une grosse banque. La Wells Fargo Bank, en plein centre de Manhattan, outrageusement et sauvagement attaquée par des méchants ! Vous vous rendez compte ? On ne peut même plus déposer ses chèques et retirer de l'argent tranquillement maintenant, pas plus qu'on ne peut plus aller se disputer avec sa conseillère bancaire en paix. Non, les méchants viennent s'en prendre aux banques, comme... bah en fait, comme toujours et comme à l'époque du Far West.

Et en arrivant sur place, je remarquais surtout que ces types avaient des armes un peu cheloues. Forcément, il fallait que je leur fasse remarquer, ils avaient probablement pas conscience de ça !

 « Eh, les gars, vous savez que vous avez des jouets, en guise d'armes ? Parce que ça ressemble beaucoup à des répliques de Star Wars ! »

Pas vrai, bien sur, mais c'était pour détourner leur attention !

Ils n'étaient pas aussi nombreux que je le pensais au premier abord, en débarquant comme à l'entrée. Cinq types, masqués bien sur. Mais j'entendais du bruit à l'intérieur du bâtiment, et le périmètre bien dégagé – la population ayant fui et la NYPD étant en chemin – me laissait penser qu'il y en avait davantage, en train de se servir allègrement ou de terroriser les employés.

 « Dernier avertissement, les gars : on se rend maintenant, ou j'appelle les Avengers. »

Pas ma meilleure technique de menace, ouais, je sais. Mais j'devais essayer !

 « Ça marche, Thor, je suis ton plan ! Mais pourquoi t'as changé de look ? T'es devenu motard ? »

Ne m'en voulez pas, à ce moment-là, je ne pouvais pas savoir que ce gars n'était pas Thor et n'aimait pas qu'on le compare à l'Asgardien. Comprenez-moi : le gars arrive, éclair de fou, tenue de motard, grande gueule et charisme de brute, et en plus de ça, il bouge comme lui ! Je ne pouvais que faire le rapprochement, comme ces pauvres gars qui se font défoncer le crâne pas un duo épique et majestueux. Je me brosse un peu, mais j'avoue être quand même plutôt fier de ce que je parvenais à accomplir devant le pseudo-dieu : quelques mouvements rapides et paf, deux au sol, leurs armes confisquées dans une toile, tandis que mon allié se chargeait des autres.

Une fois que ce fut fait, il fallait se mettre à agir aussi vite que possible. Pas question de s'attarder avec toutes ces personnes qui risquaient leurs vies... malgré les armes bizarres qui avaient réussi à secouer le Thor pas Thor.

 « Bon, ces armes, ça craint, car ça a l'air d'être un poil plus pas terrien que ce qu'on d'habitude chez les criminels du coin. Mais pas l'temps de s'attarder ! Allons à l'étage, il y a des gens là-bas, et d'autres tireurs ! »

Un coup de toile, et hop, je me hissais à toute vitesse vers l'étage en question ; c'était l'avantage de ces grands espaces, avec des rambardes et des plafonds ouverts permettant de voir aux étages supérieurs. La grande banque où on était, bien que plongée dans une semi-obscurité et avec une alarme stridente qui retentissait en permanence, je n'y étais jamais allé autrement. Pour une première fois, c'était... compliqué. Délicat serait plus juste.

 « Salut les mecs ! Jolies armes, mais lâchez les otages s'il vous plaît ! »

Il y avait, environ, à peu près, certainement, possiblement, zéro virgule zéro zéro une chance sur un million qu'ils le fassent bien gentiment. Trois malfrats, masqués, leurs armes dans une main avec de gros sacs remplis de billets, tenant chacun un employé de la banque sous le bras. Nan, franchement, dans quel monde ça marcherait ? Je n'étais pas aussi intimidant que mon allié de circonstances ? Ou alors ils venaient de le voir massacrer un de leurs potes, peut-être ?

En tout cas, ils lâchèrent les otages, qui tombèrent au sol et commencèrent à courir sans demander leur reste.

 « Arrête-toi là, Spiderman. On a des armes qui peuvent vous tuer, Thor et toi. Tu ne gagneras pas ! Le patron l'a dit. »

Où était mon pote ? Thor, pas Thor, c'est le moment d'intervenir !

 « Euh... ok ? Mais bon j'vais quand même essayer, hein ? »

 « Je suis sur le coup, Super-marteau ! »

D'un bond, je me hisse dans le vide, avant d'utiliser une toile pour me balancer vers les nouveaux criminels armés d'armes super trop bien. Franchement, on les croirait sortis d'un mauvais film de sci-fi, genre Stark Trek, ou de Star Wars tout simplement. A ceci près qu'ils n'ont pas l'air d'être des Jedi, ou même des méchants vilains Sith. Et encore moins Jabba le Hutt !

Mais, vous me direz, tout se passez bien là. Il faut donc qu'une truc arrive pour équilibrer les choses. Le karma, comme on dit dans le jargon ! Eh bah, ni une ni deux, je vous l'avoue, c'est arrivé ! En pleine balance, un tir – sûrement un type un peu plus malin que les autres – touche la toile, la désintègre, et je tombe au sol en me ramassant lourdement. Mais pas l'temps de traîner non plus, là, car très vite, d'autres tirs fusent, et ils sont pour ma pomme !

 « Arrêtez de tirer, ça fait mal ! »

Enfin, j'imagine.

Car j'étais pas vraiment touché.

Coup de poing, suivi d'un coup de toile pour projet un autre au sol. Deux de moins, plus que quatre. Ils tirent, persuadés de pouvoir me toucher directement à si petite distance. Je voltige, zigzague, saute, esquive et tout, me rapprochant petit à petit d'eux, et l'instant d'après, j'en saisis pour le projet sur les autres... et malheur ! Un tir se loge dans sa jambe droite, et désintègre la moitié. Et m... mince !

 « Oh, pardon, je suis désolé, ça doit faire mal ! Je voulais pas, promis, c'est eux qui ont commencé avec leurs tirs etc. »

C'est vrai quoi, moi je voulais juste les neutraliser, et eux, ils se tirent dessus entre eux ! A partir d'un moment, il faut pas pousser mémé dans les orties, je ne suis pas responsable de tout. Je veux bien que je suis un peu insouciant, un peu burlesque, mais je suis extrêmement habile et ce n'est pas ma faute si ces gars se tirent dessus entre eux, une bonne fois pour toutes !

En tout cas, le résultat était là.

 « C'est bon, Super-motard, ils sont neutralisés ! Je crois qu'ils ont eu leur compte, il y a plus personne. »

Retour au calme, ce qui me fait toujours très bizarre. J'ai l'habitude d'être à 200 à l'heure, et forcément, à la suite d'un affrontement, le gros moment de répit me fait pas du bien. J'ai l'impression que mon corps, ma tête, que tout en gros, me hurle de continuer de bouger, esquiver, frapper, etc... alors qu'en fait il n'y a plus besoin. Je m'approchai alors d'un des malfrats neutralisés, prenant son arme pour l'examiner. Je me grattai le menton pensivement - enfin, le bas du masque.

 « Elles sont cool vos armes, les gars. Je suppose que vous ne voulez pas me dire où vous les avez eues ? »

Pas de réponse, évidemment. Pas de signe d'un nouveau criminel, ou d'un mini-boss. Pas de signe de mon allié au look thordant – vous avez compris ? Thor-dant.

Par contre, une explosion retentit alors à l'extérieur, soufflant des voitures de police et les vitres de la banque !