De biens Sinistres cavernes [Jennifer Walters]

Il y a un truc fondamental qui, je dois l'avouer, maintenant que je suis co-directrice, m'ennuie grandement. Là où j'appuie Stark, c'est qu'il a raison d'aller sur le terrain. Non pas que la diplomatie et jongler avec les lois internationales, nationales n'est pas ma passion ni même mon coeur de métier, mais tout le temps serrer des mains, participer à des réunions pour entendre juste certains politiques se parler à eux-mêmes et exiger des actions dans telle ou telle zone de manière immédiate sans aucun retour terrain et ressources ... c'est éreintant. En plus, depuis l'affaire Krakoa et le problème Magnéto qui nous a laissé moi comme Nathan avec ce goût amer en bouche ... ben prendre soi-même les choses en main, ça fait du bien. Oh certains vont nous dire "mais mon dieux Walters, quelle idée de laisser deux co-directeurs du S.H.I.E.L.D partir sur le terrain ? Et si il vous arrive quelque chose !" avec un ton faussement outré et compatissant. Même si on sait tous qu'ils s'en fichent vu que techniquement, ils nous considèrent comme les pions de l'ONU. Leurs pions. Sauf que ça ne changera pas les faits. Ce qu'ils ont exigé pour Magnéto les a mis dans une situation inconfortable, et j'ai dû hausser la voix durant un temps pour rappeler que la faute n'incombe en rien au S.H.I.E.L.D, mais à ceux qui ont voulu sous couvert d'éteindre une menace, faire un règlement à O.K Corral. Et ... oui, ça visait aussi un peu Stark, qui a quand même guidé Maria Hill et ses hommes. Maintenant, on faisait les choses à notre manière, comme à l'époque de Nick. On ne pouvait pas se permettre de rester neutres ou juste pilotés par une tierce force. Après tout, rester neutre quand un feu fait rage, est rester auprès de ceux qui l'ont allumé.

C'est donc après un plan échafaudé par nos soins qu'Iron Man et moi-même sommes allés à Subterrania. Je connais le passif derrière ces terres en sous sol et autant dire que je me fais violence de garder ma langue dans ma poche. Il faut que je me focalise sur la mission, pas sur les erreurs d'un tel, même si un tel est aussi ici. Il faut juste penser à débouter ce sombre idiot de Sinistre, pas remuer le couteau dans la plaie. Quoi ? Non je ne suis pas venue ici pour chapeauter Stark et le surveiller ! ... oui bon ok, je dois avouer que ... peut-être ... un chouïa ... je suis aussi là pour vérifier qu'il ne va pas déclencher un énième fiasco. Au moins là, mes bras seront là pour soutenir les décombres au besoin, voilà tout !


— Oh, c'est trois fois rien. Et puis comme ça je n'ai pas encore à gérer une batterie de réunions sur les décisions transverses. Parce qu'à force, vois-tu, j'ai l'impression que mes muscles migrent petit à petit vers ma langue.

Oui, ces réunions que jusque là Cable et moi-même on s'est tapées à tout va. Ha. Jen', allez, tourne ta langue cinq fois dans ta bouche, ça ira mieux ! J'essaie de la jouer détachée et désintéressée, histoire de baisser un cran la tension. Je sais que Tony est sur des charbons ardents et qu'il met les formes depuis Magnéto. Il a dû remarquer qu'avec Cable on est ... disons pas très ok avec ce qu'il s'est passé. Mais bon, ça reste un collègue, un co-directeur. Ce n'est pas parce qu'il a ses tares récurrentes qu'on doit lui jeter la pierre directement. Non je n'essaie pas de minimiser les choses, j'essaie juste de garder une certaine cohésion d'équipe ..; une équipe qui se résume à nous deux pour le coup. Argh. Je jette une nouvelle œillade vers Stark quand celui-ci parle de sa nouvelle erreur concernant les cavernes, et j'arque les sourcils. Tiens, il reconnait son erreur. C'est un pas ! Même si ça lui arrache un peu la langue de l'avouer. C'est mieux que rien, on va dire. Je presse mes lippes et je pince l'arrête de mon nez avant d'inspirer pro-fondément. Aller ma vieille, on met les formes.

— Tu sais, Stark. La co-direction du S.H.I.E.L.D importe qu'on ait trois voix. Alors la prochaine fois, essaie de nous en parler, et sans doute qu'on pourra t'aider à limiter la casse avec Nathan.

Bon, il sait depuis belle lurette qu'avec Cable, on s'entend bien. Qu'on a une opinion qui se rejoint concernant la cause mutante. Et ça doit faire grincer des dents, dont celle de Iron-Man. Eh, il n'avait qu'à se montrer moins solo et égocentrique et ... oui non, ce serait demander à Stark de devenir une version Wish de sa personne. Oh je sais qu'il veut se faire la part belle après ce qu'il s'est passé, et pas forcément en regagnant notre estime dans mon cas comme celui de Cable. Mais tant pis, je vais essayer de faire avec. Je sors les montres dont la technologie a été un jour créée par l'institut Xavier pour couvrir certains mutants dans le monde extérieur avec une apparence plus humaine, et j'en lance une à Stark.

— Tu as le choix, je ne vais pas te mentir. Sinister a la fâcheuse tendance à cloner tellement de monde qu'on se croirait dans un crossover de comics.

(Wink wink. Oui, vous voyez bien mon clin d'oeil très appuyé, chers lecteurs)

— J'ai établi une liste de profils et anatomies qui pourraient convenir à notre fonte dans le décor. Liste que j'ai ensuite épurée de par la présence ou non des dits clones dans sa chère Londres.

Montre passée au poignet, j'active les réglages que j'avais anticipés pour prendre une apparence pour le moins ... métallique mais assez sympathique.


Tadah ! Je vous présente Rasputin IV, clone dérivé de ce cher Colossus et sa soeur Magik. Toute parée de ma grosse et fausse épée magique et craquant mes doigts en métal, je regarde de nouveau Iron Man qui n'a pas l'air de s'en sortir avec la liste que je lui ai pré établi.

— Tu sais ... tu serais pas trop mal en Claudine Renko.

La commissure de mes lèvres en dit long sur le sourire que je tente tant bien que mal de retenir. Bon, c'est bas, ça va sans doute pas le faire rire, mais au moins moi ça me fait rire.

— Sinon en entre deux, tu as son Ruckus-Cyclops Chimera. Tu garderas ton style Cyberpunk. Et puis ... je sais selon nos derniers rapports que ce gars là va servir bientôt de chair à canon avec d'autres clones plus ou moins similaires. Sinistre veut régler ses comptes avec Frost. Donc ça passera comme une lettre à la poste.

Je hausse les épaules et je me garde toujours de sourire pour ne pas trop lui mettre un coup à l'égo. En tout cas, avec tout ça, ça nous rapproche pour de bon de notre point d'arrivée. Et il faudrait peut-être penser à sortir du vaisseau, et commencer nos recherches. Je me lève et je commence à m'étirer, tout en continuant de m'adresser à mon binôme.

— Si tu penses que ça a un lien avec Krakoa, je suppose que c'est parce Sinistre veut rétablir l'ancienne version de la planète. Et que cette histoire de jungle apparue comme par magie est sûrement de son fait. Et que son château, là, c'est sa maquette pour aussi se tailler prochainement la part du lion sur la lune.

Et encore un qui veut tailler son bout de gras sur cette pauvre lune ! C'est plus satellite de la Terre, à ce rythme, c'est carrément la nouvelle amérique à coloniser avec ses conquistadores !

Les excuses de Stark je les entends. Mais ... parce qu'il y a toujours un mais avec Stark ... il se rebiffe en me mettant dans le nez que Cable avait choisi de l'aider. Et j'étais au courant. Parce que Cable avait accepté aussi que Magneto pouvait desservir à sa façon ce qui avait été si durement construit. Que même, dans son idéalisme profond et compréhensible, ses méthodes radicales pouvaient mettre de l'huile sur le feu qu'offrir la paix. Et c'est ce à quoi j'aspire. La paix. Ce n'est pas en se tapant sans cesse dessus (paradoxal pour une Hulk, pas vrai ?) qu'on va régler quoi que ce soit. Et c'est encore moins en se rejetant la faute qu'on arrivera à évoluer. Preuve en est, quand Stark souligne par justification fondée (et infondée) que Nathan lui a passé sa technologie de téléportation, j'évite de remettre de relancer les tensions en lui soulignant à mon tour qu'il l'a fait sans penser que ce qui s'est passé à Genosha irait aussi loin. Je me pince juste le nez et je ferme les yeux un temps avant de juste les rouler et faire la moue. Ça en dit long comme ça ne dit rien. Je me retiens, parce que ce qui est fait, est fait. Parce que aussi, d'une certaine manière, je suis fatiguée de devoir expliquer par a plus b à des gens que tout régler comme ils l'entendent n'a pas des conséquences énormes, surtout dans des cas pareils. Je le vois à chaque procès, à chaque fois qu'un super héros vient dans mon bureau ... tout ne peut pas être linéaire.

Cependant, même si je suis fatiguée, déçue des tournures prises, j'ai encore envie de croire que ... tout ce que j'amorce malgré le fait qu'on prenne le S.H.I.E.L.D pour juste une force à la botte de l'ONU, a un sens. J'ai envie de croire Stark, aussi. Vraiment. Mais je vois aussi les milliers de mutants qui souffrent, et dont ... je me sens bien plus proche que je ne l'aurai imaginé. Quand il me présente ses excuses, je grimace un sourire empreint d'une certaine fatigue et sans doute d'un peu de soulagement. Je le fixe avec une certaine tendresse, sincère, en signe de compréhension. On a sans doute encore un espoir. En tout cas, il prend plutôt bien le fait que je me paie gentiment de sa tête. Et oui, j'ai sciemment amené ce choix pour qu'il roule six fois sa langue dans sa bouche quand il sera sous son apparence de couverture. Eh, il faut bien que le message passe, je ne peux pas toujours être la gentille Jen' qui va juste faire "c'est pas si grave" à chaque bourde de ses coéquipiers. Les 4 Fantastiques en savent quelque chose, les Avengers aussi. Les punitions, ce n'est pas que des claques sur les fesses. Même si, dans certaines circonstances ...

Enfin bref. On arrive. Je suis impressionnée par la vitesse avec laquelle Sinistre a monté cette ville. Il ne s'est pas passé autant de temps que ça entre la dernière visite de Iron Man et aujourd'hui, si ? C'est comme si je prenais vingt ans d'amélioration dans la vue. Et j'en reste sciée, bien qu'en apparence (de clone à présent) j'apparais interdite. Silencieuse. Puis, nous sortons du vaisseau, alors que j'observe les alentours. Les bâtiments sont fonctionnels, bien pensés. C'est un cadre presque trop parfait où des gens vont et viennent comme si il s'agissait d'une journée banale à New-York. Sauf que ce n'est pas New-York, et tous ces gens ne sont pas des gens. Ce sont des répliques, des mélanges de gens avec le gène X. La voix de Stark me soutire à mes analyses quand ... nous arrivons à une place. Même constat. Tout ... semble normal. Trop normal, trop ... parfait ? Je fronce les sourcils et mes doigts se serrent sur le pommeau de ma réplique d'épée. J'ai un mauvais pressentiment.


— J'ai plusieurs théories. Soit Sinistre leur a intégré un script dès leur sortie de cuve. Soit, il y a l'option de l'embrigadement, du bourrage de crâne. Il leur a laissé la capacité de choisir, mais il leur a laissé en boucle les informations qui lui servaient. Dans tous les cas, si on se fait repérer ...

Ça fera mal. Très mal. On sera limite dans une sorte de film d'horreur sauce dystopique où un faux pas nous fera repérer, et on aura des milliers de paires d'yeux qui se tourneront vers nous avec comme seul objectif de nous annihiler. Puis, il y a cette annonce qui passe, via de vieux projecteurs de films, avec cette vieille musique d'années révolues. Je tourne la tête pour fixer la toile sur laquelle l'annonce est faite, et j'hausse un sourcil.


— Eh ben, j'en connais une qui ne sera pas ravie d'apprendre qu'elle sert de poupée vendue à la grande distribution.

Je me mords la joue, imaginant la tête de Mystique face à une telle farce. Elle serait en rage, c'est sûr. Je serai pareil si on me répliquait en mode Barbie, je dois dire. En plus c'est tellement réducteur, la vache ! Je vois aussi le potentiel qu'il y a, au delà du fait dégradant qu'on fournisse à ses clones. Cette capacité militaire. Mystique peut se changer en qui elle veut. Ce serait le moyen pour Sinistre autant d'adapter ses forces en cas de besoin que de ... surveiller qui il le souhaite, ailleurs que dans ce Londres à son image. Et là, j'ai un flash, un frisson qui remonte le long de ma colonne vertébrale ... ça ferait comme avec les skrulls. Je détourne mes yeux de ce truc que je trouve tout bonnement dégoutant, les lèvres pincées. Puis je regarde Iron Man. Enfin, je veux dire ... Ruckus-Cyclope. Mon regard est dur et sans appel. Je baisse quand même d'un ton pour que notre conversation reste la plus discrète possible.

— Sinistre est vraiment en train de préparer ce qu'il faut pour nous la mettre vraiment à l'envers. Je savais vu les rapports que c'était dangereux, mais à ce point ...

Il y a aussi les agents infiltrés qui ne sont jamais revenus. Et justement, les derniers rapports que nous avons eu étaient avant qu'ils ne donnent plus signe de vie. Je sens que ça a un rapport avec tout ça. Cette armée, entre autres. Merde mais quel souk.

— Tu as une idée brillante Ruckus ? On essaie de tailler la causette avec qui pour ... tu sais ... connaître les dernières nouvelles importantes, depuis notre retour ...

Je joue le jeu. Déjà que vu ma taille, je ne passe pas inaperçue, il faut bien qu'on se fonde dans la masse avant que quelqu'un ne comprenne que nous ne sommes ceux que nous prétendons être. Il va aussi nous falloir des infos. La seule chose qui pourra nous guider, ce sont les fameux rapports qui sont à notre disposition sur nos montres.