Forum RPG / Jeu de Rôle centré sur l'univers Marvel, notamment les comics. Pour incarner par écrit nos personnages préférés, pour vivre des aventures originales.
New York, plus précisément Manhattan. Au coeur du quartier des affaires – et plus précisément dans la zone des gratte-ciels, ces immenses structures métalliques qui défient la gravité, les cieux et les dieux. Une concurrence terrible se joue entre ces formes superbes et extraordinaires… mais un immeuble ne cesse d’intéresser, d’intriguer et d’attirer l’attention. Que cela soit par ses destructions et reconstructions successives, mais aussi par ceux et celles qu’il a accueillis, et les événements qui y sont organisés, avec faste, luxe et originalité.
La Tour Stark.
Initialement un bâtiment de bureaux et de recherches, austère et froid, selon le souhait de son créateur, Howard Stark. Complètement révolutionnée par l’esprit de son successeur, Tony, qui y injecte son goût pour l’excentrisme et l’envie de se faire voir. La Tour Stark. Il s’y passe toujours quelque chose. Il y a toujours quelque chose. La Tour Stark. Qui, cependant, a vécu il y a quelques semaines des événements difficiles – une attaque informatique, avec des dégâts. Au point que plusieurs infrastructures et modalités ont été fermés, depuis.
La Tour Stark. Pleine de bureaux, de laboratoires, de salles de réunion… et avec un penthouse, aussi. Un logement. Son logement. Celui du maître des lieux – plein de luxe, plein de gadgets, plein d’éléments mécaniques, plein d’objets de bon goût. … et avec une pièce toute rose, aussi. Choix et initiative d’une jeune femme chère au cœur de Tony Stark, qui a vécu un temps ici… et n’y vit plus vraiment, depuis peu. Stark n’a rien changé, ni aux affaires laissées, ni à la pièce rose.
Par égards. Par respect. … par espoir, aussi. Espoir qu’elle revienne. Espoir qu’elle lui revienne. Et ce soir…
Ce soir, l’espoir s’intensifie, encore.
Ce soir, alors que les lueurs du jour s’évaporent, que seules les lumières du penthouse semblent créer cette ambiance de plein jour qu’il aime bien pour travailler, Tony Stark pénètre au cœur de la pièce principale de son logement. Crispé.
Il appréhende, en fait. Depuis ce fameux soir où Natasha et lui ont dû gérer l’attaque informatique orchestrée par Arno Stark, son pseudo frère adoptif et en vérité véritable enfant des Stark, qui l’ont adopté, il… ne l’a pas vue. Il n’a pas vu Natasha, depuis. Pendant… plusieurs jours ; et même semaines.
Ce soir-là, Tony a vrillé – il n’en est pas fier, mais ne peut revenir dessus. Et continue d’essayer de gérer la colère absolue qui lui dévore les tripes, concernant Arno… et Morgan, ce cousin envoyé ici pour lancer l’attaque informatique qui a causé d’immenses dégâts ici. FRIDAY est tombée, à cause de cela. L’intelligence artificielle, mais aussi assistante, conseillère et amie de Tony, a lutté contre un virus qui continue d’être mystérieux, pour Stark, et… elle est tombée. Elle a été brisée, fracturée, éclatée… abusée, entièrement. Tony a voulu châtier Morgan pour cela – et il a fallu que Natasha le pousse à bout, pour le ramener à la raison. Il a failli ne pas en revenir.
Depuis… ils ne se sont pas vus. Depuis, il s’est noyé dans le travail – que cela soit pour rétablir la sécurité de Stark Enterprises, ou préparer un lent procédé de reconstruction, de soins de FRIDAY. Mais, aussi, avec le S.H.I.E.L.D.
Arno est en effet arrêté, incarcéré par le S.H.I.E.L.D. – et Tony est soulagé. Un peu. Il n’arrive toujours pas à aller le voir, à lui rendre visite… et son cœur est lourd, en fait.
Il se sent seul. Il est seul. L’absence de Natasha… est difficile, douloureuse. Tout comme son incapacité, à lui, à prendre sur lui et à faire le premier pas. Il s’en veut, il en veut à son ego, et… et il stresse, là. Car ils doivent se revoir. Ce soir. Ici. Maintenant.
Il souffle, il fait des exercices de respiration alors qu’il s’installe dans un fauteuil. Pour l’attendre.
Une valise est prête, à côté. Il est prêt, aussi. Bien habillé. Distingué. Lavé. Parfumé. Manucuré. Bien coiffé. Il attend. Il l’attend ; impatient, angoissé, crispé.
Il… a peur. De la revoir. Que ça se passe mal. Que ça tourne mal. Qu’il casse tout. Qu’il brise tout. Il… s’en veut, de cette distance. Il s’en veut, d’avoir… il ne sait pas. Il ne cesse de penser à ce qui va arriver, à ce qu’elle va dire – à ce qu’elle pense, de ce qu’il fait faire à Yelena, de ce qu’il a fait à Arno, de ce qu…
Il s’arrête. Il souffle. Il ferme les yeux. Il respire. Il joue sur sa respiration. Il essaye de se calmer… et d’attendre. En priant pour qu’elle ne tarde plus…
Elle a tout préparé et cela n'a pas été une mince affaire. Çà lui a pris des jours, pour être tout à fait exacte. Le Tony a tout intérêt à ne pas être trop grognon vu les trésors d'efforts qu'elle a déployés... Enfin... il aurait quelques raisons de l'être, fatalement. Alors lui donnera t'elle dix minutes pour se plaindre, vociférer et faire du boudin, avant de passer à autre chose.
Cette pensée la fait sourire, alors que sa moto vrombit sur le bitume en direction de la tour la plus en vue de New-York, filant à une vitesse dépassant clairement les limites du code de la route. Son sourire n'est cependant que de façade. Une façade d'elle-même... envers elle-même... Car les choses sont loin d'être aussi simples que Tony Stark faisant du boudin pour la énième fois et pour une détail anodin.
Ce qu'il s'est passé ce soir là... était dur à tous niveaux. Physiquement, psychologiquement, sentimentalement. Elle a poussé, abusé, dépassé la plupart des limites qu'elle s'était pourtant imposées dès lors qu'il était concerné. Encore aujourd'hui, malgré les semaines qui se sont écoulées dans un silence de plomb, elle n'est toujours pas certaine d'avoir fait les bons choix ce soir là.
Mais ce qui est fait, est fait... comme dit l'adage. Elle a choisi. Elle a décidé. Pour lui, notamment. Etait-ce une bonne ou une mauvaise chose...? Probablement un savant mélange des deux. Mais, quoi qu'il en soit, elle ne peut rien changer au passé. Le présent est le seul qui compte. Et celui-ci va devoir être parfait pour que leur avenir à tous les deux ne s'en retrouve pas modifié d'une manière qui ne plaira ni à l'un, ni à l'autre.
Natasha a passé des heures dans le cambouis avec Johnny, le seul rescapé actuel des Quatre Fantastiques que tous les univers leur envient. Et il faut reconnaitre qu'ils ont fait du bon boulot. C'est sur cette pensée, et l'évocation de ce qu'elle va lui permettre de faire, que l'espionne stoppe l'imposante moto d'ébène à quelques mètres des grandes portes vitrées de la Tour Stark.
Seules quelques lueurs persistent à l'intérieur, la plupart des employés étant rentrés chez eux étant donné l'heure avancée de la soirée. Sans retirer son casque ni couper le moteur qui tourne en laissant filtrer un mince filet de fumée blanchâtre, les mâchoires de Natasha se serrent sous l'épaisse protection de plastique et de métal.
- Okay... ça va aller. Souffle t'elle pour elle même, tout en saisissant un second casque fixé à l'arrière de la bécane.
Pianotant rapidement sur son téléphone, elle le range aussi vite qu'elle l'a extirpé de la poche intérieure de sa veste de cuir, et fixe les portes étroitement closes, casque tendu vers celui qui ne devrait plus tarder à en franchir le seuil.
La nuit domine New York. Le jour s’est couché, et l’obscurité s’empare de la Grosse Pomme – enfin, l’obscurité essaye de s’en emparer. Le ballet incessant des New-Yorkais, la vie constante qui grouille ici amène une activité dense, avec des lumières artificielles quasiment généralisées, et étendues sur toute la ville. Notamment dans le quartier des affaires… notamment dans la zone des gratte-ciels, qui veulent se détacher des ombres et attirer l’œil.
La Tour Stark ne fait bien sûr pas exception.
Natasha Romanoff bénéficie ainsi de la luminosité du bâtiment – mais est aussi éclairée par les nombreux véhicules qui vont et viennent dans l’avenue qui jouxte l’immeuble. C’est dense, encore. Bien moins qu’en journée, mais la circulation est forte, et chaque passant risque sa vie à vouloir passer d’un trottoir à l’autre.
Aucun drame ne survient, cependant. L’avenue, la ville, la zone et le voisinage ne subissent aucune perte, aucun mauvais moment, pour l’instant. C’est bien… ça change.
En attendant ainsi devant la Tour Stark, Black Widow paraît en contrôle mais ceux qui la connaissent pourraient sûrement devenir un trouble, une appréhension. Néanmoins, aucun des employés qu’elle croise ne détectent cela. Ils la saluent, ils demandent des nouvelles polies, et disparaissent vite – soit pour rentrer chez eux, soit pour commencer leur service. Tous, quand même, se précipitent sur leurs smartphones, pour lancer l’annonce sur leurs groupes de discussion personnels et professionnels.
La Romanoff est de retour ! Le patron va la revoir… et ça risque de laisser des traces. L’impatience sur les avancées de la vie sentimentale de Tony Stark est totale chez ses employés – et certains peuvent en rajouter encore. Parce qu’ils le voient. Parce qu’ils le voient… descendre, et glisser dans le hall principal du bâtiment, et filer vers l’extérieur.
Avec… une certaine classe, il faut l’avouer.
Une classe naturelle, mais aussi savamment travaillée. Le maître des lieux glisse ainsi au cœur de sa propriété – salue tous ceux qu’il croise, serre des mains, demande des nouvelles d’une épouse ou d’un conjoint, rappelle qu’il a apprécié le stage de tel enfant… et sort.
Avec un déhanché parfait. Avec un style idéal. Avec une théâtralité totale. … et un stress certain, aussi.
Peu avant, il a reçu des SMS de Natasha – et a grimacé. Non pas de la perspective de la voir (quoique, il ne fait pas le fier, là), mais… parce qu’elle a vraiment prévu quelque chose. Ça le stresse. L’imprévu. La nouveauté. L’inconnu. Le manque de contrôle.
Ça l’oppresse, ça le trouble, ça… lui coupe les moyens. Il veut fuir. Il veut s’échapper. Il veut se réfugier chez lui, dans son foyer ; dans son château. Dans son armure.
Mais… il n’en fait rien.
Tony avance. Tony arrive. Tony sort. Tony déboule à l’extérieur, voit Nat’… et sa bouche s’assèche. Et sa langue devient pâteuse. Et son corps se fige. Et… il hésite.
Il ne sait pas quoi faire. Il ne sait plus. Il stresse. Il… Il souffle. Il inspire. Il soupire. Il se reprend. Il… sourit, et lève les bras ; avec classe et autant de détachement que son jeu d’acteur lui donner.
Il ne le percevra pas, à moins que les lunettes perchées au bout de son nez en cette nuit sombre, ne soient encore équipées de l'une des technologies dont il a le secret ; mais le visage de l'espionne s'illumine d'un bref sourire, occulté derrière l'épais casque sombre à la visière rabattue, lorsqu'il s'extraie de la vaste tour de verre.
Cet instant fait partie de ceux qui lui indiquent, sans l'ombre d'un doute possible, à quel point ses sentiments ont évolué à son égard. Il y a un an tout au plus, elle aurait levé les yeux au ciel dans un sourire, en se faisant la remarque que cet homme là incarne vraiment le pacha à paillettes dans toute sa splendeur.
Mais aujourd'hui... ce n'est ni ce qu'elle voit ni ce qu'elle ressent.
Ce qu'elle a sous les yeux. Celui qu'elle a sous les yeux, est un homme qui surjoue en permanence, mais dont la prestance et le charme sont bel et bien réels. Un homme qu'elle avoue sans pudeur aujourd'hui trouver beau, charismatique. Un homme qu'elle admire malgré ses nombreuses failles. Un homme brillant, attentionné sous son épaisse armure. L'homme qu'elle aime, tout simplement.
- Ça s'appelle une moto. Fais un petit effort, je suis sûre que tu en as déjà vue avant. Lui répond t'elle d'une voix amusée, à demie étouffée sous son casque, en agitant le second sous son nez pour qu'il s'en saisisse.
- Je préconise de t'arrimer fermement.
Sa voix résonne désormais clairement dans le casque qu'il porte sur la tête, les micros liant le conducteur et le passager rendant la voix de Natasha aussi claire que si elle lui parlait en face, entourée d'un silence de plomb.
A peine enroule t'il ses bras autour de sa taille, que la moto démarre sans crier gare et file à grande vitesse sur le périphérique de New York. Bientôt, elle bifurque sur l'autoroute, alors qu'une musique résonne dans le casque de son passager. La playlist qu'il utilise lorsqu'il se plonge dans ses créations high-tech, et que FRIDAY lui avait transmise avant les sinistres évènements d'il y a quelques semaines. Elle n'était pas censée servir dans ces conditions, mais rien ne se passe jamais comme prévu entre eux... alors autant ne pas s'en étonner.
Etant donné la rapidité avec laquelle ils se retrouvent en rase campagne, on évitera de se demander à quelle vitesse roule l'espionne sur sa moto du diable fraîchement bidouillée par Johnny Storm et maintes fois optimisée par Barton et Logan. Cette moto a du être désossée et remontée plus de fois que toutes les bécanes de la terre réunies.
Au bout d'une petite heure de route, la moto déboule sur une air de terre battue et de poussière, paumée au milieu de nulle part, tel le tarmac sauvage qu'elle est si l'on en juge par l'avion qui s'élance sur la piste pour prendre son envol.
Sans ralentir un instant, il serait même plausible de considérer qu'elle accélère. Natasha fonce vers l'appareil dont le plateau arrière est ouvert, trainant sur le sol, menaçant assez sévèrement de se détacher de l'avion s'il continue à rouler à ce rythme.
- Accroche-toi.
Sa voix résonne brièvement dans le casque de Tony, alors que la moto réalise une embardée pour grimper la rampe qui mène à l'intérieur de l'appareil de métal. A peine y ont ils pénétré, que la rampe remonte lentement et que les roues de l'avion délaissent le sol.
- Si tu as envie de vomir, il y a des sachets en papier là-bas. Lance t'elle d'un air amusé sans imaginer le moins du monde que son pauvre chéri pourrait avoir mal au coeur après cette virée rocambolesque, car il en a vu bien d'autres.
Sans un mot de plus, Natasha accroche son casque au guidon de la moto, avant de se diriger vers le cockpit dans lequel ne siège... personne. Son ample chevelure, en bataille du fait du casque, flottant dans son dos et en tenue de cuir sombre des pieds à la tête comme s'ils partaient en mission.
L'avion en question est de type furtif. L'un des rares cadeaux utiles et sans contrepartie de Fury Sénior, du temps où elle était agent à sa solde. Il ne s'agit donc ni plus ni moins que de l'avion personnel de Natasha, dont peu de monde connait l'existence et qui s'avère être un petit bijou de technologie équipé d'un système d'autoguidage de pointe.
La rousse s'installe aux commandes et pousse les réacteurs sans prévenir Tony, qui risque de sérieusement valdinguer s'il n'a pas pris ses précautions par anticipation.
- Je sais que les longs voyages ça n'est pas ton fort, alors j'ai opté pour la méthode rapide. Explique t'elle brièvement tout en vérifiant le tableau de bord et sans prononcer un mot de plus de tout le trajet.
En effet, celui-ci sera dès plus court. Une heure, tout au plus, peut être un peu moins. Avec un appareil tel que celui-ci, difficile de présumer de la distance parcourue. Mais il serait vraisemblable d'imaginer qu'ils auront parcouru plusieurs milliers de kilomètres, au bas mot.
- On est presque arrivé. Estime t'elle alors qu'elle se lève du poste de pilotage et revient vers sa moto.
Elle récupère son casque et tend vers Tony une veste extrêmement légère, confectionnée dans un tissu pour le moindre étrange qu'il reconnaitra sans mal, car il s'agit d'une création que l'équipe de techniciens des Avengers ont fabriqué afin que les pauvres humains lambda qui composent l'organisation puissent supporter des températures extrêmes.
- Enfile ça. Lui dit-elle avant de lui tendre le casque, alors qu'ils sont encore en plein vol...
- Bon alors, tu viens ? Lâche t'elle en agitant le casque sous son nez d'un air impatient, comme elle l'avait fait aux pieds de la Tour Stark.
Enfourchant l'engin de métal, Natasha attend qu'un Tony sans doute dubitatif et plus que perplexe ne la rejoigne. Puis, ce qui commençait à être des plus prévisibles se précise : l'arrière de l'avion s'ouvre sur un vide sidéral peuplé d'épais nuages en contrebas, qui brouillent toute visibilité à moins d'un mètre.
Sans attendre la moindre protestation de son passager, la moto rugit comme une diablesse et s'élance dans le gouffre béant qui s'est ouvert au-dessous d'eux. Même avec les vestes conçues pour éviter de geler sur place, l'altitude à laquelle ils sont laisse filtrer un air glacial qui s'insinue jusque sur leurs épidermes. La descente étant prodigieusement vertigineuse, cette sensation ne durera fort heureusement qu'un temp.
Ils traversent les nuages à grande vitesse, la moto filant en pic vers le sol qui s'avère être une vaste étendue d'eau. Ils s'en approchent rapidement, avant que des réacteurs positionnés de chaque côté de la moto, ne se mettent en action, freinant leur chute et les faisant amerrir avec une délicatesse des plus surfaites cependant.
Durant la courte descente, la moto s'est imperceptiblement modifiée. Fruit de longues heures de travail en compagnie du quatrième des Fantastic, la bécane chérie de Black Widow a désormais tout du jet ski, alors qu'elle percute la surface aqueuse pour repartir aussitôt avec vivacité, comme s'ils avaient le diable aux trousses.
Les pourtours d'une île baignée dans la pénombre se distinguent bientôt à l'horizon. Difficile d'estimer si Tony comprendra immédiatement où ils se trouvent, mais il est certain que cette île, paumée au milieu de nulle part, n'est pas une destination hasardeuse choisie par sa compagne.
Cependant, le temps n'est clairement pas à la clémence. Natasha pousse un grognement de contrariété, qui résonne dans le casque de Tony dans la mesure où la liaison micro est toujours active. Perdu au beau milieu de l'océan indien, le climat reste bien souvent capricieux. Et si elle s'était pourtant assurée que la météo ne jouerait pas des siennes, il semble que celle-ci en ait décidé autrement, à en juger par la masse de nuages noir qui s'agglutine au-dessus de la petite surface arborée, et les éclairs qui zèbrent déjà le ciel.
Tant pis... elle fera avec.
Ils accostent sur une plage de sable fin, dont les grains s'éparpillent déjà sous l'influence des bourrasques qui les malmènent. Sans lui laisser le temps de réfléchir ou d'analyser quoi que ce soit, bien que Tony ait une faculté hors norme à pouvoir analyser n'importe quoi dans n'importe quelle situation, la main de Natasha saisit la sienne alors qu'elle l'entraîne un peu plus avant sur la plage, loin des vagues qui malmènent déjà une moto jet ski ballottée par les vagues, malgré la lourde ancre qui la maintient à flots par un miracle du Saint-Esprit.
Lorsqu'ils ont suffisamment parcouru de distance pour être à l'abri de l'eau furieuse, Natasha se tourne vers Tony, un léger sourire flottant sur son visage.
- BALERINA, tu sais ce que tu as à faire.
Tout de suite !
La voix de l'IA résonne faiblement depuis le bracelet que porte Natasha au poignet, avant que celui-ci ne se décompose en un millions de petites particules lumineuses, et ne crée un dôme d'une transparence parfaite tout autour du couple.
- Elle l'a gardé en mémoire. Précise Natasha dans un sourire, se doutant qu'il doit commencer à comprendre où ils se trouvent, si ça n'était pas déjà le cas avant.
La différence d'ambiance qui règne à l'intérieur du dôme contraste de manière flagrante avec ce qui les entoure. Là où les palmiers se déchaînent, les vagues roulent en un grondement, les éclairs, le tonnerre et même une lourde pluie martèlent l'extérieur, le dôme leur offre un cocon de sérénité et de quiétude relativement improbable au regard des éléments qui se déchaînent au dehors.
Et bien que la nuit soit aussi épaisse que l'obscurité d'un four, partiellement illuminée par les éclairs qui fustigent l'océan au dehors, une douce lumière et une chaleur agréable se diffusent des parois de la nanotechnologie de BALERINA, les enveloppant telle la bulle protectrice qu'elle sera jusqu'à ce qu'ils en décident autrement.
Dehors, c'est l'apocalypse. Dedans, un doux matin d'été.
L'île de leur premier baiser. L'endroit qui a soldé leur amitié et vu naître un amour qui, s'il est bien souvent compliqué, n'a jamais failli depuis. L'île de leurs premiers ébats. L'île qui a assisté à la décision sans doute la plus difficile de leur vie personnelle.
Natasha se place dans le dos de Tony, alors que ses bras passent de chaque côté de son buste, frôlant ses côtes. Ses mains s'ouvrent, laissant apparaître un coquillage trônant sur une paume à sa gauche, un petit crabe suspendu par une pince et qui s'agite comme une anguille, entre le pouce et l'index de son autre main, qu'elle découvre sur sa droite.
Coquillage et crustacé... tu te souviens...
Le front de Natasha chute soudainement contre la nuque de Tony contre laquelle il repose lourdement, alors que son ample chevelure de feu se répand de part et d'autres de son visage, se plaquant contre ses joues. Le coquillage et le crabe chutent lourdement sur le sable, glissant de ses mains. Le petit crabe, comme son homologue d'il y a quelques mois, ne se fait pas prier pour prendre la poudre d'escampette et s'extrait du dôme avec la bénédiction de BALERINA.
Ses bras se referment sur le torse de Tony alors qu'elle se serre contre lui, se presse tendrement tout contre son dos.
- Je te demande pardon. Souffle t'elle dans un murmure.
Ce n’est pas son habitude. Ce n’est pas son usage. Ce n’est pas son goût, non plus. Il a besoin de contrôler. De diriger, diraient certains, mais ce sont ceux qui le connaissent peu, ou mal. En vérité, Tony Stark n’apprécie pas plus que cela d’être le chef – même s’il pense souvent être le plus à même de prendre la décision finale. Mais… il a besoin de contrôler, de gérer ; d’être celui qui gère, qui impulse. Et là…
Là, il se laisse faire. Dieu que c’est dur. Dieu que ça le heurte. Dieu que ça le trouble. Mais… il le fait ; pour elle.
Oh, il réagit quand même, hé. Quand Natasha lui demande de monter sur la moto, de s’arrimer à elle, il… accepte ; mais avec ses conditions. Avec son style, glisse-t-il même avec un petit sourire – tandis que des nano-machines modifient son allure vestimentaire, pour évacuer le tissu de luxe… et faire apparaître quelque chose de plus adapté à la conduite évidemment sportive de Romanoff.
Une combinaison ; de pilote. A son nom, bien sûr. Quel frimeur, assurément. Il le dit, d’ailleurs. Il glisse quelques blagues, quelques piques, et… ça s’arrête, en fait. Ça s’arrête vite.
Quand elle démarre. Quand elle accélère. Quand elle file dans la circulation de New York. Il… se tait, alors. Tony se tait – et se force à se taire, en fait. Il ne crierait pas, non, quand même, mais… il aurait quelques grognements, quelques râles face à la conduite de Natasha – et à ce qu’il se passe, aussi. Ce qu’elle fait, surtout.
Il pousse un petit cri, il doit bien l’avouer, quand… la moto quitte le sol. Oui, oui. Natasha Romanoff, apparemment décidée à tester la résistance de l’estomac de Tony, fait littéralement s’envoler son véhicule – qui ne correspond guère aux éléments réglementaires de la circulation. Stark le comprend, le capte, s’intéresse, mais… même son esprit particulièrement curieux et capable de se projeter sur plusieurs éléments en même temps dit stop, ici.
Il souffle. Il crie, un peu. Il s’arrime, encore plus fort, à Natasha. Il ferme les yeux, même. Un peu. Une fois. Seulement, on va dire.
Il grogne, quand tout s’arrête. Il grimace, quand il rouvre enfin les paupières… et découvre un autre environnement. Un… vaisseau ? Non, un avion. Wow. Il avait bien vu qu’ils quittaient la circulation, et New York, mais… là ? Wow. Il ne sait pas. Il est perdu. Il ne contrôle rien. Il…
Il devrait détester cela. Et, au fond, il déteste bien cela. Mais… Bon, déjà, il se contrôle. Il grimace, fait une petite plaisanterie sur les sacs à vomi, et retient une remontée acide ; ouille, ça fait mal. Mais ça passe. La morale, ses vêtements et sa dignité sont saufs.
Cependant, il… parle moins, alors. Il glousse, fait quelques plaisanteries, mais ça… reste sage ; calme. Réservé. Son corps réagit quelque peu, et… il est perdu, encore. Il est troublé.
Il devrait détester cela, oui. Il parle moins. Mais… il… oui. Ça le surprend. Ça l’interpelle. Ça le trouble. Tout ça, tout ce qu’elle fait, ça… il…
Il aime ça.
Il en est le premier surpris, mais… oui. Tony apprécie ce qu’il se passe, apprécie d’être ainsi… guidé, dirigé. Mené par le bout du nez. Ça le surprend. Elle… le surprend. Oui. Hors de question de le lui dire, hein, mais… bon sang, pense-t-il. C’est bien. C’est bien d’être pris ainsi. C’est bien d’être perdu ainsi. C’est bien… c’est bien d’être à la merci de quelqu’un ; de quelqu’un en qui on a confiance. De quelqu’un… qu’on aime.
Tony est gêné, troublé ; et apprécie. Il ne dit presque rien, d’ailleurs, quand Natasha lui donne une veste – une autre allure, alors que l’avion furtif vole, et qu’il ne peut même pas se projeter où. Bon, il râle un peu, quand même… il ne faut pas oublier toutes les bonnes habitudes. Mais il suit la demande, il met l’équipement.
Il est prêt ; pour une suite inconnue.
Qui provoque d’autres troubles, encore.
Cette fois-ci, Tony râle un peu – refuse même, un peu, de suivre Natasha. Au début. Ça ne dure pas. Il hurle un peu, laisse sa voix filer dans quelques aigus… alors qu’ils quittent l’avion. Alors qu’ils en sortent. Alors qu’ils se projettent dans le vide – et filent dans les cieux.
Oh oui, il hurle encore, alors. La dignité est clairement oubliée, là… mais il essaye de prendre sur lui. Il essaye de ne pas s’humilier pleinement, mais… ah. Compliqué, quand même.
Ses yeux essayent de suivre la descente – son cœur et son ventre aussi. Ça fonctionne moyennement, mais il prend sur lui… et il y arrive. Ouf, pas de renvoi sur elle ; c’est déjà ça, il n’était pas prêt pour une telle pratique intime. Pas aussi vite, quand même, hé.
Son esprit évacue cependant ce trait d’humour, alors que le sol se rapproche… alors que la destination se précise. Une île. Une île perdue. Il maugréé, dit quelques mots transmis par micro, mais ses jambes tanguent un peu ; tremblent, surtout.
Il se laisse faire. Encore. Il arrive. Ils arrivent. Elle le guide. Elle l’amène, elle l’emmène. Il murmure quelques paroles, une vague blague… mais il cesse, très vite. Parce que la surprise est remplacée par la compréhension – la révélation, qui le prend au cœur encore.
Un dôme se constitue. BALERINA est sollicitée. L’extérieur se ferme à eux, ils sont dans la sphère – sous un dôme. Le dôme. Même heurté, troublé, transformé par ce voyage, il… suit. Il comprend. Il ressent, avant de comprendre.
L’île. Le dôme. La musique. Les… coquillages… et crustacés…
« Oh. »
Il souffle. Il arrête de respiration ; puis reprend. Et arrête, encore. Marqué. Choqué. Positivement. Et… et ensuite, elle… Natasha, elle…
Elle se jette sur lui. Elle se colle à lui. Elle se colle contre lui. Et elle murmure des mots, qui viennent le toucher – le marquer, au cœur. Il reste figé, d’abord. Interdit. Incapable de réagir, et… et ensuite…
Il souffle. Il soupire. Ses mains s’animent, enfin. Ses doigts bougent, viennent se coller sur elle ; sur ses cheveux, qui lui ont manqué. Sur sa peau, qui le fait frissonner en la touchant, tant le contact a aussi été d’une absence trop longue. Il tremble, sous cela… sous tout ceci. Il tremble, et… et elle parle, et lui… et il…
Il soupire. Puis… s’effondre.
Tony tombe ; à genoux. Devant elle. Sans se faire mal, sans se blesser. Mais en se plaçant pleinement à genoux, pour… non plus qu’elle se colle à lui. Mais pour que lui se réfugie, contre elle.
Ses larmes coulent. Sans qu’il les retienne. Sans qu’il puisse les retenir. Ses larmes coulent, il ferme ses yeux, et il… Et il parle.
« C’est… moi. C’est moi qui suis… je… pardon. J’ai… foiré. Encore. J’ai encore foiré… »
D’une voix douce, faible ; brisée.
« J’ai cru… t’avoir perdu. J’ai… je suis… j’ai foiré, j’ai… fait des bêtises, j’ai… j’ai cru t’avoir perdu, et je… je suis… »
Il grimace. Car tout sort. Car tout cède. Car tout s’échappe de lui.
« Je suis… perdu… sans toi. J’ai… »
Il soupire. Il s’arrête. Il hésite. Il hésite un instant, seulement. Les mots à venir comptent, n’ont quasiment jamais été sortis de lui ; mais ils sont justes, ici. Ils sont forts. Ils sont bons. Ils sont… vrais.
« J’ai… besoin de toi. Pour être… moi. Pour être… le meilleur de moi-même. Je suis… désolé. J’ai… besoin… de toi… »
Parce qu’il l’aime. Parce qu’il est touché, plus que tout, par tout ceci ; par ce qui est la plus belle preuve d’amour qu’il ait reçue, par le cadeau le plus fort qu’on lui ait offert. Tout ça. Organiser tout ça. Revenir à la base. Revenir au cœur. Revenir au début. Revenir… à eux.
Tony est touché. Tony est marqué. Tony… cède. Avec Natasha. Pour Natasha. … ensemble. Enfin. Encore.
La surprise est la première émotion qui se manifeste. Ses sourcils s'élèvent brièvement au-dessus de ses paupières, alors qu'il se tourne dans sa direction. Le mouvement est si soudain, si spontané et si rapide, qu'elle ne l'a prédit à aucun instant. Il s'agirait de quelqu'un d'autre, il aurait sans doute déjà une lame appuyée contre sa gorge.
Mais cet homme-là, n'est pas n'importe qui. Il s'agit de Tony. Tony Stark.
Un voile de tristesse passe brièvement sur le visage de l'espionne lorsqu'il tombe à genoux en enlaçant son bassin, plaquant sa joue contre elle en une détresse palpable.
Il ne simule pas. Il n'a jamais su faire. Il n'exagère pas non plus. Tony est un être tout ce qu'il y a de plus spontané, même s'il est parfois capable d'endosser un masque, et pas uniquement celui d'Iron Man.
Elle a commis une énorme erreur. Natasha s'est fourvoyée. Elle n'a... pas fait ce qu'il fallait. Elle s'en rend compte à cet instant précis. Elle avait cru... Elle avait imaginé... Pensé que...
- Tony...
Je te demande pardon. Ces quelques mots ont été prononcés il y a quelques secondes à peine. Pardon de t'avoir infligé cette scène il y a quelques semaines. Pardon d'avoir mutilé ton cousin sous tes yeux. Pardon de t'avoir poussé à réagir aussi abruptement.
Natasha chute à son tour dans le sable fin, alors que la tempête se fait plus forte autour d'eux, comme un écho à la détresse poignante de son compagnon.
Elle n'a pas demandé pardon pour les bonnes raisons. Natasha pensait, totalement à tort elle s'en rend désormais compte, que Tony avait été profondément marqué par ce qu'il s'était passé ce soir là. C'est sans doute vrai. Cela a laissé des traces. Cela l'a perturbé. Mais pas comme elle s'y attendait. Pas comme elle l'avait envisagé.
- Tony...
Elle répète doucement son prénom. Plusieurs fois, du bout des lèvres. Son bras s'enroule autour de lui, alors que sa main libre caresse l'épaisse chevelure sombre. Alors qu'il déverse son chagrin contre elle, blottit au creux de son ventre, le buste de Natasha se penche dans sa direction, le couve comme un second dôme qui viendrait renforcer celui dans lequel ils se trouvent déjà.
- Je suis là...
Il parle. Il se brise. Il...
La gorge de Natasha se serre au fur et à mesure que les mots s'échappent de ses lèvres presque tremblantes, presque suppliantes. Mal... tellement mal...
Comment. Comment a-t-elle pu lui faire tant de mal. Ce n'est pas ce qu'elle voulait. Ce n'est pas ce qu'elle avait imaginé. Ce n'est pas... non.
Ses lèvres se posent sur son front, plusieurs fois. Elle l'embrasse à de nombreuses reprises, parcourant délicatement la peau pâle, déposant un baiser sur sa tempe, entre ses sourcils, au sommet de son front.
- Tony...
Son étreinte se referme d'avantage sur lui, alors qu'elle se penche un peu plus pour le couver. De ses bras, de sa chevelure qui les protègent du reste du monde, de ses lèvres tendres qui lui indiquent que...
- Je suis là Tony... Je serai toujours là, je te l'ai promis.
Une promesse à laquelle elle a déjà failli pourtant. Ces derniers semaines... elle l'a abandonné. Mais... elle croyait... elle avait imaginé... qu'il lui en voulait à mort pour ce qu'elle avait fait. Il aurait eu toutes les raisons du monde d'être en colère même si, cette nuit là, elle pensait que c'était nécessaire.
Elle n'avait pas imaginé...
- Tu n'as rien à te faire pardonner... tu n'as aucune excuse à me faire. C'est moi qui ai merdé... Je pensais que tu aurais besoin de temps après ce qu'il s'est passé. Je pensais... que tu me verrais différemment après ça. J'avais cru... qu'il te faudrait du temps pour digérer... je n'avais pas imaginé... je ne pensais pas que tu...
...m'aimais autant.
Car est-ce bien là la vérité. La seule personne qui l'aie jamais aimée de manière inconditionnelle... c'est Yelena. Et encore, pas sans adversité, pas sans complexité ni épreuves à traverser. Oh... elle ne doute pas que Bucky l'aura vraiment aimée. Comme Barton sans doute. Cependant c'était... différent. Peut-être parce que Tony et Natasha peuvent difficilement être plus opposés. Peut être à cause de tout ce qu'ils ont traversé jusqu'à aujourd'hui. Peut-être pour d'autres raisons qui lui échappent à cet instant.
- Personne...
Ne m'a aimée comme tu m'aimes.
- Personne...
Ne m'a jamais dit qu'il avait besoin de moi.
- Personne...
Ne m'a jamais dit que je le rendais meilleur, qu'il était perdu sans moi.
Mais les mots peinent à s'extirper de sa poitrine, restant bloqués au fond de sa gorge par pudeur, parce qu'ils n'osent peut-être croire en eux-mêmes, croire en ce que tout cela incarne, ce que tout cela englobe. Que tout cela... les mettra probablement tous les deux en danger dans l'avenir.
Alors, à défaut de lui avouer vraiment ce qu'elle ressent... elle ponctue ses mots d'une nouvelle promesse qui, bien qu'elle aurait été formulée tôt ou tard, cache des sentiments bien plus profonds.
Il le fait instinctivement, directement ; sans réussir à s’en empêcher, sans le vouloir non plus. Il cède. Il s’effondre. Il s’écroule. Il s’ouvre.
Tony Stark s’abandonne complètement dans les bras de Natasha Romanoff – dans les bras, puis contre le ventre. A genoux. Agenouillé devant elle. Dans une posture non pas de soumission, mais de repli, de blessure ; de douleur, qu’il ne parvient pas à gérer, juguler. Il s’ouvre, en s’abandonnant devant elle.
Sans honte. Sans gêne. Sans regret. Sans remords, non plus. Sans… peur.
Durant toute sa vie, Tony a eu peur de s’ouvrir – de se livrer aux autres. Il a eu peur d’être jugé, rejeté, méprisé ; de ne pas correspondre aux attentes. Il a fait semblant, alors. Devant Howard, devant les camarades ; devant les filles. Il a fait semblant, pour répondre à ce que les autres voyaient en lui. Il a fait semblant, pour avancer, pour réussir comme Howard le souhaitait… pour survivre.
Il a fait semblant. Avec les proches, souvent. Quelques rares élus ont pu voir le vrai Tony Stark – pas toujours quand il le voulait, car l’alcool a fait voler ses défenses et rappelé à la surface le pire de lui-même. Les vieux démons demeurent et rôdent encore. James Rhodes a pu voir au-delà de l’apparence. Miss Arbogast aussi. Et… et les femmes…
Il a toujours fait semblant, avec les femmes. Même les plus proches. Même Whitney. Même Bethany. Même Rumiko. Même… Pepper.
Il a toujours fait semblant ; pour se protéger. Pour ne pas souffrir. Pour ne pas subir. Pour ne pas être peiné, encore. Pour ne pas être jugé, et rejeté. Il a toujours fait semblant. Il a fait du mal, alors. Il s’en est voulu, mais il a continué. Derrière une armure.
Jusque… là. Jusqu’à… elle. Elle. Qu’il connaissait déjà. Avec qui il avait déjà été ; dans une vie passée et éloignée, quand ils étaient deux personnes si différentes. Lui le jeune industriel sûr de lui, le super-héros arrogant, cachant la honte et la peur de la blessure derrière plusieurs couches d’armure, en refusant toute approche. Elle l’espionne acharnée, dévouée, surjouant sa loyauté pour tenter de trouver un but à sa vie erratique. Elle, oui. Natasha Romanoff. Une ex. Une coéquipière. Une alliée. Une camarade. Une… amie. Qui l’est toujours. Qui est plus, maintenant.
Il soupire, lourdement, alors qu’elle multiplie les baisers sur lui, sur son front. Chaque contact le fait frissonner. Chaque caresse le fait trembler. Chacun de ses mots le fait vibrer. Et sourire. Le visage demeure rongé par la peur, la douleur, l’appréhension, l’émotion… mais le sourire vient. Le sourire revient. Le sourire est ramené ; par elle.
Elle parle, encore. Elle se colle à lui, encore. Elle se rapproche. Elle le tient. Elle le retient. Elle le ramène. Il se laisse faire. Il se laisse emporter. Il se laisse prendre. Il s’abandonne ; encore.
Il devrait détester. Il adore.
Il redresse lentement la tête, et ouvre ses bras. L’étreinte se confirme. Le rapprochement se poursuit. Ils se collent, l’un à l’autre. Ils se tiennent, l’un à l’autre. Ils tiennent… à l’autre. Ils tiennent, l’un avec l’autre.
Il inspire. Il sourit. Il soupire. Il… se détend. Il s’abandonne. Il s’ouvre. Il baisse l’armure. Il a fait confiance, il a tout donné… et elle répond.
Elle ne le rejette pas. Elle ne se moque pas. Elle ne le juge pas. Elle… l’accepte. Comme il est. Comme il est vraiment. Elle s’explique, elle s’excuse – il relève les yeux. Il croise son regard. Il sourit. Il parle, d’une voix douce ; et tendre.
« Tu… n’as pas plus merdé que moi, Romanoff. »
Romanoff. Le surnom utilisé en mission, mais aussi pour piquer – pas méchamment, mais avec humour et douceur.
« J’avais… besoin de toi. Un peu pour… encaisser, le fait que tu as dû aller aussi loin pour me sortir de l’état dans lequel j’étais – et ouais, ça risque de te surprendre, mais j’ai un p’tit égo. »
Il sourit. Quelle audace.
« Mais… surtout pour encaisser… ce que j’avais fait. Je… me suis fait peur. Je suis… redevenu celui que j’ai été, que j’ai pu être… et je déteste ça. Je ne veux pas de ça. Je ne veux pas… être ça. Et… tu as dû me sortir, de là. Tu as dû me rappeler qui j’étais – et tu as réussi. Je… ouais, on a merdé tous les deux. Mais… tu as bien fait. Je… te remercie de m’avoir ramené… Natalia. »
Natalia. Le nom qu’il utilise dans les moments forts, intenses, personnels ; intimes. Ça compte. Beaucoup.
Il inspire, ensuite. Il inspire, écoute, frissonne même quand Natasha se répète et prépare une réponse qui le fait trembler. L’émotion passe dans son regard, et il ne le détourne pas. Il se rapproche, même. Il se rapproche encore plus – et ne fuit pas. Ne fuit plus.
Avec elle, il ne fuit plus. Avec elle… il se surprend même à formuler des mots auxquels il n’a pas pensés avant, qui le surprennent – mais qui paraissent soudain si justes, et vrais.
« C’est… une proposition ? Tu… as quasiment un genou à terre, après tout. Attention, c’est le genre de moment où tu pourrais… tout obtenir de moi… »
Y compris… une telle proposition. Il demeure troublé de dire cela, de ressentir cela – et attend beaucoup de la réaction de Natasha. Sans angoisser. Sans stresser. Sans craindre le pire. Parce qu’ils ont connu le pire ; chacun de leurs côtés, et ensemble. Ils ont connu le pire. Ils sont encore là. Ils se sont retrouvés. Ils ne se quitteront plus.
Situation : Super Espionne, Super Héroïne, Super compagne de Tony Stark
Localisation : Mobile (ou éventuellement New-York)
Inventaire : - Deux bâtons courts
- Trois pistolets automatiques
- War Widow (au poignet ou portée)
- Deux bracelets utilitaires
Re: Nothing Else Matters [Natasha Romanoff] Dim 5 Mai - 22:20
L'apparence est le coeur du royaume de Tony Stark. Le Paraître avant l'Être. L'Irréel avant le Réel. Les gestes amples. Les grandiloquentes envolées lyriques. Les costumes sur-mesure. Les voitures clinquantes, les armures tout aussi tape à l'oeil. Et ne parlons pas des montres. Il convient de se donner un rôle. Il est publique, toujours, même dans la sphère privée. Il faut paraître, quel qu'en soit le prix, quel que soit le moment. Paraître fort, paraître gérer la situation. Tout le temps. Toujours.
Mais parfois... le vernis s'effrite. Une simple fracture, une toute petite surface lisse entachée d'une zébrure. Le vernis craque, puis finit par se dissoudre dans l'océan des regrets, de l'amertume, de la culpabilité. Un trop plein qu'il arrive parfois à laisser filer, qu'il arrive par moment à évacuer. Avec les bonnes personnes, à l'instant adéquat, au moment où il le peut. Ce n'est parfois pas plus compliqué que ça.
La façade d'apparences cède, en même temps qu'un Tony s'échoue contre elle, presque recroquevillé sur lui-même. Natasha le couve d'un regard compatissant, alors que ses bras s'enroulent autour de ses épaules. Tony est capable de prendre sur lui. Beaucoup plus que son caractère extraverti et ses frasques multi quotidiennes ne le laissent penser. Mais il a ses limites, comme tout le monde.
L'espionne a l'habitude de tout intérioriser. Ses craintes, ses doutes, ses conflits de conscience. Parfois elle partage, mais cela reste relativement rare. Non pas que ce soit une véritable volonté de sa part. Les Avengers lui ont enseigné ceci : s'ouvrir à ses compagnons d'arme, s'ouvrir à celles et ceux qui sont désormais devenus une famille. Mais le naturel, les habitudes et, sans doute le coeur névralgique de tout cela, les conditionnements et entraînements auxquels elle a été soumise durant tant d'années, n'aident pas beaucoup en cela.
Alors, dans un sens, elle l'admire. Elle admire cette capacité à craquer purement et simplement. Cette faculté a lâcher prise, à se laisser aller aux larmes, à exprimer tout ce qui a été jusqu'alors refoulé. La dernière fois qu'elle s'est laissé allée de la sorte, et encore ce n'était pas comparable, c'est le jour où elle a du appeler Strange et Banner en urgence. Ce jour maudit entre tous où elle a cru que Tony rendait son dernier souffle. Avant ce jour là... elle ne se souvient pas de la dernière fois qu'elle a véritablement ouvert les vannes.
Alors, dans un sens, se satisfait elle que Tony soit capable de le faire et, surtout, qu'il le fasse.
- Tu m'en diras tant. Lâche-t-elle dans un sourire en coin, alors qu'il avoue avoir son petit égo.
Natasha ne répond rien lorsqu'il affirme que c'était nécessaire. Que ce qu'elle a fait, la violence avec laquelle elle l'a fait, devaient être faits pour le ramener à la réalité. Pas sûr que celui à qui il manque plusieurs doigts soit de cet avis... mais l'ex agent du S.H.I.E.L.D préfère éviter de remettre le couvert sur le sujet. Ne fera t'elle donc aucun commentaire.
Il lui faut déployer un sang-froid et un self-control dont elle seule a le secret, pour parvenir à ne pas se décomposer face à ce qui suit. Il a vraiment un putain de don hors norme pour sortir des lapins de son chapeau aux pires instants. Piquée au vif, elle manque cependant de lui faire remarquer que c'est lui qui a les deux genoux rivés au sol à cette minute. Mais ça serait l'encourager dans son délire, alors autant éviter. Il serait fichu de prendre ça comme une invitation à poursuivre.
Le silence qui s'installe entre eux n'aura jamais été plus long ni plus pesant que celui qui s'instaure alors.
Comment peut-il envisager une telle chose... Elle qui a déjà toutes les peines du monde à passer plus de deux nuits par semaine chez lui, nonobstant les missions qui l'en empêchent de base, évidemment. Il lui aura fallu près de quatre mois pour laisser ne serait-ce qu'une brosse à dents dans sa salle de bain, et elle a du se faire violence.
Qu'imagine t'il... ou, plutôt, comment peut-il imaginer qu'ils seront capables, qu'ils seraient capables, de vivre la vie de monsieur et madame tout le monde. De se poser, de se... marier...? Avec tous les risques que ça implique, pour eux et pour leur entourage ? Etre en couple désormais officiellement est suffisamment dangereux comme cela. Sans compter que, rien que ce simple fait, c'est une première pour l'espionne. Parce que bonjour la discrétion lorsque l'on est officiellement engagée dans une relation avec Tony Stark. C'est limite s'il n'a pas fait un communiqué de presse sur le sujet. Ca se trouve... il l'a fait.
Et après quoi... on se marie, on habite ensemble, on achète un chien, un monospace et on s'installe dans un quartier tranquille, avec le jardin et les rosiers près de la boite aux lettres ? Puis il va vouloir un enfant ? On adopte, car il ne lui fera sans doute pas l'affront d'oublier que la Red Room s'est chargé de veiller à ce qu'elle n'en aie jamais, il y a fort longtemps...
A grand renfort d'images qui se superposent dans son esprit, une boule se forme dans la gorge de la rouquine. Si elle n'est clairement pas le genre de personne à être facilement sujette au stress, déformation professionnelle oblige, cette situation présente déclenche une bouffée d'angoisse qui n'est pas pour lui plaire et qui provoque, pour toute réponse, une phrase de quelques mots à peine, qu'elle lâche dans un souffle.
Il sourit. Il lui sourit, encore. Il lui sourit, toujours. Il affiche encore et toujours cette expression positive, cette ouverture de bouche qui révèle ses dents, et provoque le plaisir et la sympathie chez ceux qui le voient. Il sourit, pour elle. Il sourit, avec cette humeur charmante, ce côté séducteur et entreprenant qui lui convient bien, qui plaît tant ; qui lui plaît tant aussi, à elle, bien qu’elle refusera sûrement de l’admettre.
Il sourit, alors qu’elle répond. Il sourit, alors… alors qu’elle…
Il sourit, encore. Même si quelque chose se brise, en lui. Même si quelque chose craque.
Son cœur ? Non. Le cœur de Tony Stark ne saurait se briser, parce que Natasha Romanoff est honnête avec lui ; et lui demande d’être honnête en retour, avec elle et lui-même. Elle ne le rejette pas, elle le rappelle à l’ordre.
Son amour pour elle, leur relation ? Non. Ils sont adultes. Ils ont vécu, subi, souffert, perdu ; dans la vie, et en amour. Ils savent tous deux qu’une relation ne se forge pas dans la niaiserie et les accords communs constants. Un couple, c’est un combat ; contre les autres, contre l’autre, contre soi-même.
Son amour-propre, alors ? Non. Celui-ci a déjà bien souvent souffert et subi, et une telle rebuffade n’est pas du genre à l’anéantir. Bien qu’il doive admettre que cela pique, quand même, et qu’il envisageait une autre réponse.
Et… c’est ça qui se brise, en fait. L’illusion. Pas les illusions. Pas les rêves d’enfant. Pas les espoirs adolescents d’amours éternels. Non. L’illusion. L’illusion que cela existait, quand même ; tout ça. Les illusions, les rêves, les espoirs. L’illusion que tout finirait forcément bien. L’illusion que les contes de fée sont réels, et qu’ils allaient bien en vivre un.
L’illusion. Qu’ils étaient normaux. Qu’ils étaient comme les autres. Qu’ils étaient capables et compétents, pour mener une telle vie. Classique. Familiale. Métro, boulot, dodo ; sexe une fois par semaine, deux enfants, un chien, un pavillon. Sur la Lune, quand même, c’est Tony Stark.
L’illusion. Qu’ils puissent définitivement se détacher de leurs vies, de leurs passés ; de leurs failles, de leurs marques, de leurs douleurs, de leurs pertes. L’illusion. Oui. C’est ça qui se brise. C’est ça qui craque. C’est ça qui s’évapore.
Ce… n’est pas suffisant pour tout envoyer bouler ; pour tout détruire. Pour tout perdre. Pour la perdre. Ça n’aurait pas été le cas avant, mais… mais maintenant…
Il grandit. Il évolue. Il mûrit. Il comprend. Il accepte. Il vit ; avec. Et il vit tout court, aussi. Avec elle.
Comme elle est. Comme ils sont. Comme ils peuvent être.
« Ah… vraiment ? Mmh… dommage. Je vais… devoir forcer ma nature, donc, et être… définitivement la meilleure version de moi-même ? Un sacré défi, mais… mmh. J’crois bien que tu en vaux le coup, Natalia. »
Sa voix est douce. Sans aigreur. Sans crispation. Sans attaque. Sans rancune. Sans manque.
Il accepte. Il fait avec. Il vit avec. Elle. Par et pour elle.
Sans un mot, Tony lui vole un baiser, et se recolle à elle ; se reconnecte à elle. Se pose sur elle. Se calme. Avec et par elle.
« Mmmmmh… au fait… y a encore des surprises, ou… c’est fini ? »
Oui, il fait sentir presque une pointe de déception, malgré l’ampleur, la folie et la merveille des surprises réservées jusque-là. Oui, il provoque. Oui, il pique. Oui, il est chié. Mais… hé, c’est Tony Stark ; et elle vient de le calmer dans une demande en mariage. Il faut bien compenser un peu !